10 Avril 2008

Voici mes réponses à trois questions posées par les organisateurs du Festival de Romans à propos de l'expression sur internet. Je vous les reproduis ici en attendant de reprendre le fil de ce blog, c'est à dire (surtout) les histoires de flics. Vous connaitrez ainsi la version soft et édulcorée de mon point de vue sur internet en général, et les blogs en particulier. Le festival de Romans se déroulera les 18, 19 et 20 avril prochains. J'ai gagné le 1er prix en catégorie littérature de la version 2007, et cette année, je suis dans le jury de cette même catégorie. L'an passé, Gonzague Saint-Bris faisait partie de ce même jury, et je me souviens très bien que d'aucuns avaient clamé qu'il n'avait pas compétence à estimer la valeur de leur prose. En toute modestie... Oui, la blogosphère est vraiment un petit monde merveilleux. 


 


  Quelle est ta vision de l'expression sur internet aujourd'hui ?

  Mon regard sur internet est de plus en plus critique et exigeant. Je m’interroge sur les limites de cet espace d’absolue liberté d’expression, ses contraintes, ses codes, et l’usage que chacun en fait. Internet est malgré tout un grand bordel où on trouve le meilleur comme le plus insignifiant (ou le pire), et où si tout peut être dit et montré, tout ne justifie pas d’être lu et encensé. Qu’il s’agisse d’information où chacun peut s’improviser journaliste ou de toute création artistique, littéraire, etc, la quantité exponentielle de sites sur le net rend la découverte de trésors très aléatoire, mais parfois jouissive quand émergent la rareté et l’originalité. Pour ma part, l’intérêt d’internet réside autant dans l’observation de son contenu que dans celle des comportements internautes. Et les blogs, addictives petites tribunes à ego, sont un support très intéressant en la matière. Toute la tragi-comédie humaine est dans les blogs. Et entre expression, créativité, besoin d’exhiber et prétexte à échanger, on ne sait pas lequel est l’alibi de l’autre. C’est pourquoi des initiatives telles que le festival de Romans sont les bienvenues pour découvrir des talents inconnus dans l’immense magma webien.

  Qu'est-ce qui, selon toi, a marqué Internet cette année ?

  La campagne présidentielle, la politique en général, et un militantisme effréné « en ligne » qui promettait de faire basculer toutes les tendances ! Mais j’en ai gardé l’habitude de m’informer en grande partie sur internet, pour l’instantanéité et la multiplicité de l’accès à l’actu. Sur les sites des médias traditionnels, mais aussi des sites militants ou critiques très intéressants, et quelques sites collaboratifs exigeants en qualité, et dépassant l’analyse primaire et pipeulisante de l’actualité. Et cette année aussi, l’apparition de réseaux sociaux tels que facebook qui d’après moi est un non-évènement, une gigantesque usine à gaz, et un simulacre d’ouverture aussi stérile que chronophage. Les gens communiquent et s’associent sur ces plateformes avec ceux qui appartiennent déjà à leur sphère et à leur mailing-list. Les castes et snobismes ont au moins l’avantage d’être explicites, c’est assez révélateur, et internet semble générer plus de petits ghettos et de hiérarchies à l’identique du fonctionnement social de chacun, que d’universalité. Les réseaux thématiques axés sur la création et l’art semblent être plus efficaces, et prouver qu’Internet est un fantastique outil avant d’être un mode de vie, un accès et non pas un territoire.

  Quelle est ton actualité ? Comment a évolué ta présence sur le web ?

  Mon actualité a été très liée à celle de mon livre, FLiC chroniques de la police ordinaire qui est paru en mars dernier, et récemment en édition de poche. Mon blog est alors devenu un point de contact précieux avec mes lecteurs et mes collègues. FLiC s’est très bien vendu, j’ai eu beaucoup de presse et de contacts, et j’ai participé à plusieurs salons du livre. Aujourd’hui j’envisage d’écrire autre chose, et j’ai quelques projets. Ma présence sur le web est discrète, je ne remplis pas frénétiquement mon blog, et je n’ai pas l’obsession de la visibilité. Je préfère de loin utiliser internet pour m’informer, découvrir d’autres horizons m’en remettant le plus souvent au hasard qui est un très bon guide.

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Bénédicte Desforges

#vies de livres

5 Avril 2008

  « Heureusement qu’il existe toujours une morale aux histoires : la date de péremption de ce produit surviendra rapidement? Dommage pour Bénédicte !... »

  Ainsi finissait un mail reçu quinze jours après la sortie de FLiC l’année dernière, mail que je viens de retrouver en triant un dossier d’Outlook que j’ai appelé poubelle, une sorte d’archive puante faisant office de baromètre de la connerie et la hargne ordinaires.
  Il s’agissait d’une diatribe qui se voulait critique, mais qui n’était qu’un règlement de compte cousu de fil blanc. Le type, un professionnel de la science molle improvisé fouille-merde, descend FLiC, l’auteur et ses lecteurs avec une hargne surdimensionnée, et force guillemets et citations du livre à l’appui. Mais c’est un intellectuel, voyez-vous. Un grand penseur de la police, un idéologue de la sécurité du fond de son bureau avec comme seul risque professionnel celui de se planter un crayon dans l’œil. Il lit des choses sérieuses normalement, pas des livres venus de nulle part écrits par auteurs non agréés. Il a des exigences, il passe sa vie à analyser, à conceptualiser ce qu’il n’approche pas. Ce qui facilite son dérapage en vrille dans le procès d’intention.
  Aurait-on affaire à une soubrette comique en service commandé ? C’est bien possible. La démarche est évocatrice. Jugements péremptoires, certitudes et mépris. On ne peut pas plaire à tout le monde, et déplaire n’est pas nécessairement un déplaisir. Déplaire à un crétin aigri et revanchard est même une bonne chose.
  J’avais été quelques jours entre l’envie de lui répondre et celle de laisser tomber. Son texte était en forme d’article prêt à paraître alors j’ai attendu le moment d’un droit de réponse. Rien n’est venu. Il a gardé ça pour lui et moi.
  Je ne peux pas publier ici ce mail, ni le nom et la fonction de celui qui me l’a envoyé, il a sa petite notoriété dans la police et il est entouré de puissances et d’influences non négligeables. Mon but n’est pas qu’il soit reconnu, je me fous de lui, il n’est que la voix de son maître, la voix du mépris. Et je ne vais pas risquer un procès en diffamation, calomnie, injures et tout le tremblement, pour sa petite personne hautaine. Il risquerait d’en jouir.
  Mais je vais répondre à lui, et à ceux qui pensent pareil. Ceux qui ne me trouvaient pas de légitimité à écrire FLiC, ceux qui ont surtout bavé qu’on puisse ouvrir les portes de la police comme je l’ai fait, sans prétention ni obscurantisme. Sans jugement et sans polémique. FLiC, ce n’est pas un hargneux ni un donneur de leçons, ce n’est même pas un témoignage, il n’en a pas la construction. C’est un livre d’histoires de flics, et rien de plus. J’ai été flic et rien de plus.
 
  Monsieur,

  Vos extrapolations fumeuses sur mes motivations à écrire sont totalement déplacées et non avenues. Vous n’avez décidément rien compris, ou pas cherché à comprendre dans une autre direction que celle qui vous arrange (vous et ceux qui vous ont inspiré, je ne suis pas dupe, loin s’en faut).
  Vous avez vu bien des choses entre les lignes de ce livre, précisément dans ces espaces que j’avais laissés vierges. Pauvre idiot, ce livre n’a pas été fait à des fins médiatiques puisque ces textes n’étaient déjà pas destinés à devenir un livre, et qu’ils n’ont pas été réécrits.
  Vous n’y avez rien senti, je dirais que c’est normal, vous avez un pince-nez. Ce que vous appelez les poncifs les plus éculés de la nature humaine, les flics, c'est à dire les professionnels de terrain – tout ce que vous n’êtes en aucun cas – y reconnaissent un regard similaire au leur. Mais comme vous êtes parfaitement insensible à ce qui peut nous fédérer, et que vous démontrez un mépris global envers tout ce qui ne vous ressemble pas, vous traitez sans vergogne mes collègues et autres lecteurs confondus, de poujadistes, lecteurs de gare ou lecteurs voyeurs. Quelle belle leçon ! Quel jugement minable !
  Vous n’aimez pas les flics – quoique le galon et les hautes études trouvent grâce à vos yeux – et vous supposez à partir d’un portrait que les flics seraient tous des nazillons en puissance dont je cache les déviances totalitaires derrière un prototype. Par pudeur sarkozienne ou lepéniste… Pitié ! Faites preuve d’originalité, avec votre niveau d’études et vos diplômes, vous en avez les moyens. Des machos aussi ? Allons donc ! Que de poncifs éculés à votre actif en si peu de mots ! Au moins on sait à quoi s’en tenir à propos du portrait robot du flic en vigueur dans votre institution…
  Vulgaire ? Mais c’est vous qui êtes vulgaire parce que vous avez une pensée commune, banale, stéréotypée. Pour qualifier mon registre, je préfère de loin la grossièreté à la vulgarité. Ou alors, vous êtes fâché avec les subtilités du vocabulaire usuel et vous ne faites pas la différence.
  A propos de diplômes, la remise en question du concours externe n’est qu’une affaire d’expérience, mais ça vous ne pouvez pas le comprendre, je le conçois et passe l’éponge sur cette ineptie. Voyez plutôt ce qui se passe ailleurs en Europe au lieu d’user de projections limpides sur vos potes flics surdiplômés. Ceci dit vos diplômes ne semblent pas être un gage de recul dans vos analyses. Le chiffre « opium de la police » vous a grave interpellé, dites-vous. Normal, le chiffre est votre fond de commerce, sans le chiffre point d’idéologie sécuritaire à distiller à l’envi mon pauvre monsieur… De profundis.
  Vous nous connaissez si mal, nous flics en tenue, et avez tellement de conclusions à étayer avant la moindre démonstration, que tout vous échappe. La peur de l’arme n’en était pas une, vous n’avez rien compris. Le copinage putes, travelos et consort n’est pas de bon aloi, il est banal et répandu. Parfois même une nécessité. Mais ne faisant pas partie des statistiques policières, il vous est et restera étranger. Aucune copine trotskiste ne m’a rembarrée, apprenez la lecture rapide pour éviter l’égarement dans la diagonale. Je vomis sur la maçonnerie policière. Oui, et alors ? Il y a blasphème ? Ça vous dérange ? Ça vous concerne ?
  Mon livre est un non évènement, c’est vous qui le dites mais vous n’avez aucune autorité en la matière. Et puis je m’en fiche, je n’ai pas vocation à être un évènement. Du reste, vos livres sont aussi des non évènements, mais la presse n’a même pas signalé qu’ils l’étaient. Mauvaise pioche. Je suis une vieille conne qui écrit pour les cons de tous bords un livre enfanté de mon cerveau sentimental. Là aussi vous n’aviez pas capté que ce livre n’est qu’un sentiment… Et quand vous parlez de mes sales motivations, vous ne frisez pas le ridicule, vous êtes en plein dedans.
  Et puis non, je n’ai décidément pas de projet, tout n’est pas calcul ni complot. Pas davantage de plan de carrière. Que dalle. A un moment de ma carrière, oui, j’ai commis l’extravagance de passer un concours, une légère ascension comme vous dites avec amusement. Et pourtant rien n’aurait mal tourné, ni par hasard ni à dessein. Vos ragots sont erronés, veuillez consulter vos sources. Ou mes collègues de l’époque, votre propos devrait les amuser. De plus ils font partie de mes lecteurs voyeurs poujadistes, et bizarrement me croient sur parole puisque ces histoires sont aussi les leurs. Incroyable comme démonstration, hein ?
  Vous n’avez rien appris et n’avez été étonné de rien. Vous êtes un érudit, monsieur, un intellectuel. Moi pas. Je n’ai rien à vous transmettre, vous savez déjà tout, preuve en est ce mépris qui n’épargne personne. Ni la police, ni les autres, ni la presse et pourtant que ne feriez-vous pas sans elle…
  Dans votre « critique », vous êtes allé trop vite en besogne et votre pétard mouillé n’a pas une once de crédibilité. Si j'avais eu ça en stock (un pétard), je vous aurais volontiers proposé de tirer dessus, ça vous aurait grave détendu.
  Votre mail était une saleté trop hargneuse et insultante pour être innocente, trop rapide après la sortie du livre pour ne pas être téléguidée. Sachez que même si j’écris pour des abrutis de lecteurs voyeurs amateurs de romans de gare, il y a certainement plus de satisfaction intellectuelle à être lue par des dizaines de milliers de personnes, dont certaines vous avouent avoir été réconciliées avec la lecture et d’autres déclarent regarder les flics différemment, que d’écrire sans plaisir des livres destinés à des lecteurs déjà convaincus de vos démonstrations besogneuses, et prétendument initiés à la question policière. Sur ce coup, vous n'êtes pas copain avec le chiffre, n'est-ce pas ?
  Alors au lieu de vous jeter comme un enragé sur la littérature modeste pour analphabètes, je ne saurais trop vous recommander de continuer à lire les livres que je ne suis pas parvenue à finir, vous savez, ceux qui se périment à peine sortis et qui coûtent cher en à valoir aux éditeurs. Mais également les ouvrages politiquement corrects et administrativement serviles.
  Ah oui, une dernière chose : vous avez méchamment sous estimé la date de péremption de FLiC.
 

Bénédicte Desforges, auteur de FLiC, chroniques de la police ordinaire

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B. Desforges

#vies de livres

3 Avril 2008


© photo Goon : http://a-tension.eu


Il est beau, il est drôle, il est influent, il sent bon la pipe...
Et je ne le vois qu’une fois par mois.
Aaargh... que la vie est mâle faite !

Ah Laurent, pourquoi toi, pourquoi l'Assassin, pourquoi les hommes, pourquoi les cheese-burgers et la guiness, pourquoi wikio, pourquoi les vélib en hiver, pourquoi ?...

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B. Desforges

#ailleurs...