“vies de livres”

13 Juillet 2008

[Je ne remercie pas celui qui m’a fourgué ce questionnaire.]

1 - Quel(s) souvenir(s) avez-vous de votre apprentissage de la lecture ?
Je m’en souviens très bien. C’était dans un livre à couverture rouge qui s’appelait Kiki et Rococo. Méthode syllabique. J’ai enchainé sur Oui-oui et le Cerf-volant, mon premier vrai livre.

2 - Vos lectures préférées lorsque vous étiez enfant ?
Tous les Oui-oui, et les autres collections de Enid Blyton.
Et puis une série qui s’appelait « 15 histoires de… » qui était des extraits de livres de même thème, donc mise en appétit pour passer aux ouvrages complets. Et aussi les « Contes et Légendes de... » Et les Arsène Lupin de M.Leblanc,
Et des grandes sagas comme Tant que la Terre durera de H.Troyat.
J’habitais loin en Extrême-Orient, il faisait chaud chaud chaud, et je lisais non-stop tous les bouquins de la bibliothèque de l’alliance française. Je n’ai jamais autant lu que dans l’enfance et l’adolescence.

3 - Aimez-vous la lecture à haute voix ?
Non, sauf quand c’est Fabrice Lucchini qui lit.

4 - Votre conte préféré ?
La Petite Sirène (la vraie, d’Andersen)
Pinocchio (le vrai, de C.Collodi)

5 - La meilleure adaptation d'un roman ou d'une pièce de théâtre
L’Amant de Marguerite Duras. Je n’ai jamais vu un film coller d’aussi près à un roman. Une performance. Mais en règle générale, je ne vais jamais voir l'adaptation au cinéma d'un livre que j'ai aimé.

6 - Apprenez-vous par cœur certains poèmes, répliques de théâtre, passages de roman ?
Les Stances du Cid régulièrement, pour faire chier le monde.
Maintenant, je les mime aussi, c’est affreux.

7 - Avez-vous des livres ou des magazines dans vos toilettes ?
Quelques Karaté Magazine pour les copines constipées.

8 - Avez-vous plusieurs lectures en chantier ? Combien ? Lesquelles ?
Plein, je ne peux pas les lister. Par geste compulsif de solidarité débile, j’ai ramené plein de livres dédicacés des salons du Livre, que je ne lirai jamais, et qui s’additionnent à tous ceux que je laisse en stand-by.

9 - Le poète que vous ne cesserez jamais de relire / de vous réciter ?
Il n’y en a pas. Ah si... Léo Ferré.

10 - Le livre que vous avez lu le plus rapidement ? Le plus lentement ?
Rapidement vu le pavé, je me souviens de Il Viendra de J.Attali en deux jours.
Sinon, un ou deux livres par semaine, en moyenne.
Le plus lentement, j’en sais rien. Si c’est laborieux, je lâche l’affaire. Comme pour le chiantissime Seigneur des Anneaux que j’ai tenté à deux reprises.

11 - Préférez-vous les éditions de poche aux originales ? Pourquoi ?
C’est moins cher, ça prend moins de place, mais je ne renonce pas au grand format pour tous les livres. J’ai un faible pour les Gallimard et les Actes Sud.

12 - Le(s) livre(s) que vous ne rangez jamais dans votre bibliothèque et qui traîne(nt) toujours ?
En ce moment, le Code de la Propriété Intellectuelle O_o

13 - Quel est votre rapport physique à la lecture ? Debout ? Assis ? Couché ?
Pas debout. Vautrage assis ou couché.

14 - Vos lectures sont-elles commentées crayon en main ?
Rarement. Mais je mets souvent des petits bouts de papier déchirés pour marquer plusieurs pages (je n'aime pas les corner).

15 - Offrez-vous des livres ?
Oui, mais je sais que ça a un coté coercitif.

16 - La plus belle dédicace, que ce soit de l'auteur ou de la personne qui vous l'offrit ?
Ma grand-mère sur un Pif-poche.

17 - Quel est votre rapport sensuel au livre ? (Odeur, texture, etc.)
Maintenant que vous le dites, oui je crois bien que je les renifle. Mais je ne les goûte pas.

18 - Quels sont les auteurs dont vous avez lu les œuvres intégrales ?
Plusieurs. C’est un peu une manie quand j’apprécie le premier ouvrage lu. Entre autres : Zola, Boris Cyrulnik, Yukio Mishima, Paul Auster, Boris Vian/Vernon Sullivan, Ray Bradbury, Yves Navarre, Guillaume Dustan.

19 - Un livre qui vous a particulièrement fait rire ?
Le Code de Procédure Pénale.

20 - Un livre qui vous a particulièrement ému ?
Des Fleurs pour Algernon, de Daniel Keyes
Le vieux qui lisait des romans d’amour de Luis Sepulveda
Maus de Spiegelman (BD)

21 - Le Livre qui vous a terrifié ?
La Bible.
La Plaisanterie de Kundera

22 - Le livre qui vous a fait pleurer ?
Plusieurs, mais le premier qui me vient à l’esprit est Les Noces Barbares de Y.Queffélec.

23 - L'avertissement / l'introduction qui vous a le plus marqué ?
Aucun.

24 - Le titre le plus marquant, original, décalé, astucieux ?
Alice est montée sur la table de Jonathan Lethem, l’histoire d’une femme qui tombe amoureuse du vide. C’est un cadeau de mon troll fidèle.
Les Cafards n’ont pas de Roi de Daniel Evan Weiss.

25 - Décrivez votre bibliothèque.
C’est le modèle Billy de chez Ikéa.
(Ah ? C'était pas ça la question ?)

26 - Le(s) livre(s) dont vous vous êtes finalement débarrassé ?
Bon nombre de livres récupérés au pilon. Livres de cours de droit périmés. Réglementation des taxis. Réglementation des poids lourds. Code de déontologie.

27 - L'endroit le plus insolite où vous lisez ?
A vélo.

28 - Il ne vous reste que trois jours à vivre : que souhaitez-vous lire ou relire ?
Pour trois jours de sursis, mieux à faire que lire, faut pas déconner ho !

29 - Votre livre d'art préféré ?
Les sculptures de Camille Claudel. Je suis sérieusement persuadée que c’est Rodin qui s’est inspiré d’elle, et pas l’inverse.

30 - La bibliothèque idéale ?
La BNF pour son contenu, soyons fous.

31 - L'incipit qui vous a le plus marqué ?
Ce n’est carrément pas le genre de chose qui me marque. Je ne lis pas un livre comme une copie de devoir de français, à découper et décrypter par parties. En revanche, je reviens parfois sur les premières pages en fin de lecture d’un livre.

32 - La clausule qui vous a le plus marqué ?
Comme là non plus, je n’ai aucune idée, on va dire la dernière phrase de mon œuvre unique et complète :
« Alors de les voir se couvrir de mes cendres un mercredi à midi, et se prendre des bouts de mes os sur la tronche, moi qui fut un os pour eux, je me verrais bien mourir une deuxième fois, mais de rire. »
C’est magnifique.
C’est dans FLiC, chroniques de la police ordinaire by moi

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Bénédicte Desforges

#vies de livres

20 Juin 2008

scène1

« J’ai adoré votre livre. A-doooo-ré !
Tellement, tellement… émouvant. Et votre façon d’écrire, de raconter, de voir les choses… Tellement, tellement… humaine. Oui, humaine, c’est ça. Ce métier difficile… Mais humain, très humain… Pénible, oui… Comment faites-vous… comment peut-on supporter cette misère… le pire de l’humain… la violence… la mort...

Ça ne doit pas être facile tous les jours… rentrer chez soi le soir avec toutes ces images… être la cible de la critique, des médias… impopularité… mépris… éboueurs de la société comme vous dites, c’est vraiment ça… Fantastique. Et c’est très bien écrit, vraiment très bien écrit, c’est fou. On pleure, on rit, on pleure, on rit. Formidable. Une plume… du style... du rythme. Génial. J’adore.
Authenticité… émotion… humanité…
Les films standards… déjà vu et entendu… connaissent rien… pas authentique… pas crédible… manque quelque chose…
Votre plume m’intéresse… vraie plume… vrai flic… idées… histoires… scénario.
On peut se voir ?
On se retrouve à la prod ? »

[fin de la scène]


scène 2

Paris. Je vérifie l’adresse sur mon bout de papier, et je m’arrête devant l’immeuble. C’est bien là. Je passe devant une plaque dorée. Production. Je monte l’escalier. Tapis épais. Je sonne à une porte. Plaque dorée. Production. La porte s’ouvre. Affiches de cinéma sur les murs. Ambiance. Artiste.
« Bonjour, j’ai rendez-vous avec Truc.
- Vous êtes qui ? »
La secrétaire joue avec sa mèche de cheveux, faussement décoiffée, devant son Mac sur un bureau savamment désordonné.
« Bénédicte Desforges, auteur de FLiC, chroniques de la police ordinaire, je suis peut-être un peu en retard.
- Bougez pas, j’appelle Truc. »
Elle part au bout du couloir en faisant bouger ses cheveux. En attendant, je regarde en biais ce qui traîne sur son bureau. Tasse de café vide, tasse de café à moitié pleine, logo sur les tasses, dossiers, logo de la prod sur les dossiers. Photos de tournage.
« Truc finit un coup de fil avec Los Angeles, et il vient vous chercher.
- Ok, merci. »
Elle se remet à son bureau et répond au téléphone.
« Blablabla… blablabla… Hahaha ! »
Des pas pressés dans le couloir. Jean délavé, chemise blanche, grand sourire.
« Bonjour, désolé de t’avoir fait attendre ! On va aller dans mon bureau. »
On se serre la main. Je le suis dans le couloir. Il fait bouger ses cheveux.
« Installe-toi. Tu veux un café ? Long ? Court ? Sucre ? Myriaaaaaaam ! Deux cafés ! Et qu’on ne me passe pas d’appels. »
Grand bureau. Grande fenêtre. Lumineux.
Canapé, fauteuils, affiches de films, logo.
Il s’assoit, pieds sur la table basse, croise les jambes, joue avec sa mèche. Cigare.
« C’est très sympa que tu sois venue.
- C’est moi qui te remercie de…
- Non, non, vraiment. Je te le redis, j’ai adoré ton livre. Adoré. Flic, quel boulot… »
La secrétaire apporte les cafés sur un petit plateau. Un téléphone sonne.
Elle quitte rapidement la pièce.
« Tu n’as jamais pensé à travailler pour le cinéma ? ça rapporte plus que l’édition, tu sais.
- Je n’ai pas eu vraiment le temps d’y penser, mais…
- Ah, mais tu devrais !
- Peut-être que je devrais, oui, non, je ne sais pas…
- Dis, on parle pas mal des flics en ce moment, il y a eu un suicide je crois ?
- Non, neuf suicides. En un mois.
- Oh putain !
- Oui, c’est… c’est moche.
- Des suicides par arme à feu ?
- Ça dépend. Pas forcément.
- Ah bon ?
- Hé bien hier, c’est une jeune femme flic qui s’est jetée par la fenêtre. Avec son petit.
- Oh putain !
- …
- Et ?
- Ils sont morts tous les deux.
- Oh putaiiiiiiiiin !
- C’est horrible. On ne comprend pas vraiment ce qui…
- Terrible !
- Oui, c’est terrible. En ce moment, il y a…
- Génial ! C’est génial !
- Quoi ??...
- Excellent !
- …
- Première scène d’un film ! J’adooore ! Putain, c’est tellement tellement fort !
- Film ??...
- Un film qui commence par un suicide, quoi ! La femme, son enfant, la fenêtre, c’est super !
- Mais…
- Oui, c’est exactement comme ça que je vois les choses. Caméra à l’épaule. Première scène. Suicide. La fenêtre. Les étages. Beaucoup d’étages. »

[fin de la scène]

texte extrait de Police Mon Amour

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10 Avril 2008

Voici mes réponses à trois questions posées par les organisateurs du Festival de Romans à propos de l'expression sur internet. Je vous les reproduis ici en attendant de reprendre le fil de ce blog, c'est à dire (surtout) les histoires de flics. Vous connaitrez ainsi la version soft et édulcorée de mon point de vue sur internet en général, et les blogs en particulier. Le festival de Romans se déroulera les 18, 19 et 20 avril prochains. J'ai gagné le 1er prix en catégorie littérature de la version 2007, et cette année, je suis dans le jury de cette même catégorie. L'an passé, Gonzague Saint-Bris faisait partie de ce même jury, et je me souviens très bien que d'aucuns avaient clamé qu'il n'avait pas compétence à estimer la valeur de leur prose. En toute modestie... Oui, la blogosphère est vraiment un petit monde merveilleux. 


 


  Quelle est ta vision de l'expression sur internet aujourd'hui ?

  Mon regard sur internet est de plus en plus critique et exigeant. Je m’interroge sur les limites de cet espace d’absolue liberté d’expression, ses contraintes, ses codes, et l’usage que chacun en fait. Internet est malgré tout un grand bordel où on trouve le meilleur comme le plus insignifiant (ou le pire), et où si tout peut être dit et montré, tout ne justifie pas d’être lu et encensé. Qu’il s’agisse d’information où chacun peut s’improviser journaliste ou de toute création artistique, littéraire, etc, la quantité exponentielle de sites sur le net rend la découverte de trésors très aléatoire, mais parfois jouissive quand émergent la rareté et l’originalité. Pour ma part, l’intérêt d’internet réside autant dans l’observation de son contenu que dans celle des comportements internautes. Et les blogs, addictives petites tribunes à ego, sont un support très intéressant en la matière. Toute la tragi-comédie humaine est dans les blogs. Et entre expression, créativité, besoin d’exhiber et prétexte à échanger, on ne sait pas lequel est l’alibi de l’autre. C’est pourquoi des initiatives telles que le festival de Romans sont les bienvenues pour découvrir des talents inconnus dans l’immense magma webien.

  Qu'est-ce qui, selon toi, a marqué Internet cette année ?

  La campagne présidentielle, la politique en général, et un militantisme effréné « en ligne » qui promettait de faire basculer toutes les tendances ! Mais j’en ai gardé l’habitude de m’informer en grande partie sur internet, pour l’instantanéité et la multiplicité de l’accès à l’actu. Sur les sites des médias traditionnels, mais aussi des sites militants ou critiques très intéressants, et quelques sites collaboratifs exigeants en qualité, et dépassant l’analyse primaire et pipeulisante de l’actualité. Et cette année aussi, l’apparition de réseaux sociaux tels que facebook qui d’après moi est un non-évènement, une gigantesque usine à gaz, et un simulacre d’ouverture aussi stérile que chronophage. Les gens communiquent et s’associent sur ces plateformes avec ceux qui appartiennent déjà à leur sphère et à leur mailing-list. Les castes et snobismes ont au moins l’avantage d’être explicites, c’est assez révélateur, et internet semble générer plus de petits ghettos et de hiérarchies à l’identique du fonctionnement social de chacun, que d’universalité. Les réseaux thématiques axés sur la création et l’art semblent être plus efficaces, et prouver qu’Internet est un fantastique outil avant d’être un mode de vie, un accès et non pas un territoire.

  Quelle est ton actualité ? Comment a évolué ta présence sur le web ?

  Mon actualité a été très liée à celle de mon livre, FLiC chroniques de la police ordinaire qui est paru en mars dernier, et récemment en édition de poche. Mon blog est alors devenu un point de contact précieux avec mes lecteurs et mes collègues. FLiC s’est très bien vendu, j’ai eu beaucoup de presse et de contacts, et j’ai participé à plusieurs salons du livre. Aujourd’hui j’envisage d’écrire autre chose, et j’ai quelques projets. Ma présence sur le web est discrète, je ne remplis pas frénétiquement mon blog, et je n’ai pas l’obsession de la visibilité. Je préfère de loin utiliser internet pour m’informer, découvrir d’autres horizons m’en remettant le plus souvent au hasard qui est un très bon guide.

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Bénédicte Desforges

#vies de livres