L'honneur du flic

10 Janvier 2011

PP

  J'ai l'honneur de vous rendre compte des faits suivants...
  J'ai l'honneur de mettre à votre disposition Machin Chose...
  J'ai l'honneur de vous demander...
  J'ai l'honneur de solliciter de votre (très) haute bienveillance...
  J'ai l'honneur de vous soumettre la révision de ma notation...
  J'ai l'honneur de tendre le cul pour que vous y foutiez des coups de pied...

  La coutume de l'écriture amidonnée est à l'honneur dans la police. Toute forme de communication écrite à un supérieur hiérarchique est un honneur, c'est une convention.
  C'est un honneur de rendre compte d'un accident de la circulation, comme d'une belle arrestation. Un honneur de présenter sa démission, un honneur de contester une sanction. La courbette s'écrit très bien, et quand elle se fait, elle a aussi ses usages dialectiques.

  Mes respects ! Dès que le galon n'est plus en chevron, mais blanc et droit, ou pire, décoré de feuilles de chêne, il est de bon ton de présenter ses respects. Même si on n'en pense pas un mot, ce qui est souvent le cas... Quand j'ai pris mes fonctions au commissariat du dix-huitième arrondissement - j'avais alors quelques années derrière moi dans le grade de gardien de la paix, et quelques minutes de carrière d'officier -, un jeune flic est venu vers moi à l'entrée du poste, il s'est mis au garde-à-vous, et m'a dit avec la bouche en cul de poule : “ Mes respects, madame l'Officier ” avant de hurler un  “ Fixe ! ” à l'attention des policiers qui besognaient dans le commissariat. Je connaissais l'usage pour m'y être pliée, mais je n'étais pas encore prête à me le voir appliquer. Tout le monde s'est levé et immobilisé comme quand on joue à un-deux-trois-soleil. J'ai demandé au jeune collègue si ça lui posait un problème qu'on se dise bonjour comme des gens normaux, lui précisant que j'étais insensible à ces marques de respect qu'on m'avait pourtant enseignées à l'école. On m'avait appris à les formuler, mais pas à les recevoir, et vécues de mon récent point de vue galonné, elles me semblaient déplacées. Je préférais concevoir la hiérarchie dont je faisais désormais partie, comme une répartition exponentielle de responsabilités, et le fait de pouvoir endosser celle de ma brigade, plutôt que la mise en œuvre d'un arsenal de gestes coutumiers et vides de sens. Le flic m'a répondu : “ À vos ordres, madame l'Officier ! ” et il est parti faire une belle carrière dans le syndicalisme. Comme quoi, ça peut parfois être porteur pour qui s'acharne et persévère.
  Sur la fin, avant de placer volontairement ma carrière entre parenthèses, j'avais banni de tout rapport écrit et gestuel les formules de politesse policières qui me paraissaient infondées. Je n'avais plus d'honneur à présenter puisqu'il m'avait été confisqué en même temps que mes velléités à me transformer en Robin des bois, et j'avais beau réfléchir, je ne me souvenais pas qu'il y ait jamais eu à mon égard une attitude bienveillante de la part de ma hiérarchie, à laquelle je ne vouais même plus le respect que l'on doit à n'importe quel inconnu. Les rapports administratifs que je rédigeais s'en sont trouvés considérablement diminués en volume, et je m'obligeais à l'exercice de la paraphrase pour qu'il puisse au moins y avoir un sujet (moi), un verbe (demander) et un complément d'objet direct (une mutation, et en désespoir de cause, une mise en disponibilité).

  J'ai l'honneur en carafe quand je me souviens de la façon dont vous m'avez traitée...
 

Texte extrait de Flic, chroniques de la police ordinaire

bénédicte desforges

#chroniques d'un flic ordinaire

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H
<br /> Je ne sais pas quelle formule utiliser pour m'excuser auprès de ma hiérarchie d'avoir attenté à ma vie, mettre raté, être resté pusieurs jours dans le coma et être suivi chaque semaine par un<br /> Psy.<br /> Simplement parce que mon ancienne hiérarchie n'a jamais eut aucune formule de politesse et de considération à mon endroit.<br /> <br /> <br />
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G
<br /> "Mes respects Commissaire !" dit le gardien, parfois ponctué d'un salut de la main réglementaire. Ce à quoi, pas toujours, répond le commissaire par un "Bonjour!". Cher Totor, vous pensez que le<br /> respect, dans cette situation au combien banal dans notre profession, est le même de chaque côté du galon ? Soyons sérieux ! Pourquoi devrions nous indiquer par le mot un respect particulier alors<br /> que le commissaire se contente d'une vague politesse d'usage... surtout quand on voit comment les gardiens de la paix, et certains officiers, sont traités par la hiérarchie. La politesse est une<br /> chose, le respect une autre. Etre poli avec mon commissaire, mon officier, mon gradé, bien entendu comme avec tout être humain. Indiquer mon respect particulier envers une personne sans que<br /> celle-ci ne le mérite, c'est une forme de soumission !<br /> Je ne pense pas que la police redore son image par le respect absolu de régles idiotes qui confinent à la servitude volontaire des fonctionnaires à une hiérarchie dont nous avons trop souvent des<br /> exemples de mépris. Le respect se mérite non ? La police a bien d'autres choses à faire pour être plus exemplaire que de respecter l'irrespect envers ses fonctionnaires par d'autres fonctionnaires<br /> plus haut placés.<br /> Bien sûr, je ne veux pas totalement généraliser car je connais des commissaires et des officiers qui méritent mon respect et des gardiens comme moi qui ne l'auront jamais !<br /> <br /> <br />
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N
<br /> Mince alors!..<br /> J'ai jamais lu ou entendu ce genre de formule chez nous.<br /> Nous n'oserions cette bêtise, malgré notre grand humour belche.<br /> <br /> "J'ai l'intenable honneur de vous foutre l'empreinte de mon 44 ballerine sur le fondement de votre immense bêtise".<br /> "J'ai l'honneur presque joyeux de vous annoncer l'évaporation distinguée de votre époux, lors de l'explosion d'une usine de produit toxique".<br /> <br /> Dans ce cas... te donne raison.<br /> <br /> Nocif<br /> <br /> <br />
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A
<br /> @ nocif :"faudrait déjà être con pour écrire: j'ai l'honneur de vous faire part du décès...<br /> Un peu de sérieux. "<br /> <br /> c'est pourtant la formule obligatoire à toute en-tête de rapport de police "J'ai l'honneur de vous rendre compte des faits suivants :" même quand les faits en question sont les circonstance d'un<br /> décès...<br /> <br /> Ne vous en déplaise.<br /> <br /> <br />
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N
<br /> Les proportions de cons, de problèmes sont les mêmes partout!.. dans toute la/les société/s... Y a que les décors qui changent suivant les milieux.<br /> La désorganisation est généralisée. C'est pas fait pour aider à la communication, crénom... Juste le contraire.<br /> <br /> <br />
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N
<br /> faudrait déjà être con pour écrire: j'ai l'honneur de vous faire part du décès...<br /> Un peu de sérieux.<br /> <br /> <br />
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N
<br /> La vulgarité ne favorise jamais les relations d'aucunes sortes, elles provoquent toujours finalement de la collision...<br /> Les formules de politesses synthétiques de vos supérieurs permettent de tenir les distances "nécessaires" à "un ordre" hiérar-chique...<br /> Je pense que vous faites erreurs...<br /> Votre révolte intérieure date de bien avant expérience dans la police...<br /> Tout est dans tout.<br /> Et exister à quel prix?<br /> <br /> <br /> Nocif<br /> <br /> <br />
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F
<br /> je suis en accord et en désaccord avec votre post ; c est vrai les formules ronflantes m énervent et a part deux ou trois exeptions , je n'ai jamais ressenti ce respect ou cet honneur . le respect<br /> se gagne aussi sur le terrain , et comme je l'ai dit a un commissaire, qui a fait la tete, un officier de l'armée , quand je marchais 60 kms , il était devant avec sa carte et nous conduisait tous<br /> , là il peut y avoir respect ; et non passé a coté de nous en voiture, alors que ca fait 3 heures de plante verte sous la flotte et demander " ca va , besoin de rien , pas trop dur " là, j'ai pas<br /> de respect ,surtout si le gars a 15 ans de moins que moi , et me fera la morale parce que j'ai oublié une virgule sur un rapport .<br /> maintenant , l hypocrisie est une forme de diplomatie , et sans cela il n 'y a pas de rapport humain et tout tourne au conflit ; moi le gus qui me dit " moi je suis franc , je dis toujours ce que<br /> je pense " ; il a pas appris que l'on tourne 7 fois sa bouche avant de parler , ca veut dire que l'on réfléchit avant de l'ouvrir . alors je crois que les hauts placés ne sont pas cons, ils se<br /> savent détester , mais ils s en foutent ; alors a quoi sert de leur dire , a rien ! alors je vis ma vie, je fais mon boulot pour le service du citoyen qui lui souvent le mérite , et je rentre chez<br /> moi serein ; je ne vais pas en plus des bandits , m engueuler avec les collégues ;<br /> vivre ensembe n est pas s aimer , c est faire des concessions , j en fait , je demande qu'on en fasse aussi , et tout ira bien ainsi .<br /> <br /> <br />
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B
<br /> <br /> Je ne dis pas qu'il faut bannir la politesse des échanges verbaux conventionnels, je mets simplement en relief la distorsion entre certains mots et leur usage.<br /> Quant à votre définition de la franchise, je suis tout à fait d'accord.<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> "J'ai l'honneur et la triste habitude de vous rendre compte des faits suivants..."<br /> <br /> Comment peut on avoir l'honneur de rendre compte du décès d'une personne, d'avoir cassé une voiture de la boite ou d'expliquer poliment et avec courtoisie à sa hiérarchie qu'elle nous emmerde et<br /> que ce qu'elle nous demande de faire est totalement contraire à notre éthique policière ?<br /> <br /> Mais peut être totor saura-t-il répondre ?<br /> <br /> <br />
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K
<br /> Suggestion : remplacer "J'ai l'honneur" par "J'ai le malheur". Exemple : j'ai le malheur de solliciter une révision à la hausse du budget alloué à nos services pour l'achat de etc ... ". Hein ?<br /> <br /> <br />
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J
<br /> Et bien moi j'adore lire Bénédicte! totor je suis désolé de vous le dire mais vous êtes un pisse froid! vous comprenez rien au ton utilisé par notre chère écrivaine! continu Bénédicte moi<br /> j'approuve et je suis surement pas le seul!<br /> <br /> <br />
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T
<br /> Dites simplement si vous avez un peu d'honneteté ce qui m'étonnerait fort au vu de ce que je lis !!!que vous refusez de publier ce qui vous vexe et vous dérange. Quel manque de courage : vous<br /> préférez insulter les gens !!!<br /> <br /> <br />
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B
<br /> <br /> Oui c'est vrai. Je dis des gros mots comme "idiot" et "ridicule". C'est affreux.<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> et vlan passe moi l'éponge !!!!!!<br /> toutes les rhétoriques et autres formules pompeuses ne remplaceront jamais le véritable respect que l'on doit simplement à autrui... après c'est juste un usage d'un autre temps dont certains se<br /> gargarisent en flattant leur égo...<br /> <br /> <br />
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T
<br /> Réponse:<br /> "Mais il y contribue fortement quoique vous en disiez et fassiez".<br /> <br /> Votre réponse est très légère !!! c'est le moins que l'on puisse dire et montre votre manque d'acceptation de la loi alors que vous étiez censé la faire appliquer !!!.<br /> Ne vous étonnez pas des difficultés à vous faire respecter... Il faudrait complétement refondre cette corporation...car quand je constate l'attitude de certains Policiers il y a du pain sur la<br /> planche !!!..<br /> <br /> <br />
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B
<br /> <br /> "Totor" vous êtes un bidasse idiot et malpoli.<br /> Vous arrivez par ici pour expliquer que les conventions de respect et de politesse sont justifiées et ont du sens, mais vous ne vous présentez pas et ne dites rien du donneur de leçon que vous<br /> êtes, planqué derrière un pseudo ridicule.<br /> Vous faites semblant de ne pas comprendre ce texte qui est écrit sur le ton du pamphlet, et qui n’est qu’un petit aperçu de la portée et l’inadéquation de certains mots avec leur réalité.<br /> J’aurais aussi bien pu vous décortiquer l’expression "bonjour-ça-va ?" ou "s’il vous plait" mais il ne me plait pas de le faire (en tout cas pas avec vous parce que vous êtes également<br /> un bidasse borné)<br /> Je ne confonds en aucun cas la loi avec ce qui relève des usages et règlements. Ça n’a juste rien à voir. Mais vous faites la confusion sans même vous en rendre compte, de même que vous traduisez<br /> la distance que l’on peut prendre certains automatismes, par un manque de loyauté. C’est complètement imbécile et de très mauvaise foi.<br /> <br /> <br /> <br />
T
<br /> Je ne comprends pas du tout votre attitude et votre critique systématique des réglements et traditions qui font la particularité du milieu militaire et également Policier depuis quelques<br /> années.<br /> Même si ce respect vous parait parfois hypocrite, il n'en n'est pas moins réglementaire et la manifestation d'une attitude respectueuse et humaine. Je préfère voir les personnels se saluer et se<br /> vouvoyer plutôt que d'avoir des tenues sales et des attitudes de "dépravé" qui se tapent dans le dos comme le sont certains Policiers. Il faut l'avoir vécu pendant toute sa carrière pour<br /> s'apercevoir que ce système fonctionne et donne des résultats probants. De plus, il fait honneur à toute la corporation, et il montre que si on veut être respecté il faut être respectable. Je<br /> pourrai en parler pendant des heures mais sachez que vous faites totalement fausse route et que vous devriez avoir honte de critiquer l'Etat et ses institutions dans son fondement: si vous ne<br /> l'acceptez point partez, mais cessez de ne rien respecter. Ce n'est pas l'attitude d'un officier qui doit avant tout être un modèle et un exemple... Par contre vous faites appliquer la loi aux<br /> autres ce qui est un manque total de loyauté...Désolé pour mes propos, mais votre écrit est totalement irrespectueux même si vous avez vécue des chose dures.<br /> <br /> <br />
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B
<br /> <br /> "... Ce n'est pas le rince-doigts qui fait les mains propres, ni le baise-main qui fait la tendresse..."<br /> <br /> <br /> (Léo Ferré - Préface)<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> "j'ai l'honneur de ne pas te demander ta main" Et pourtant je vous adore!<br /> <br /> <br />
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B
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G
<br /> Cette rigueur ,j'aimerai qu'elle se manifeste aussi dans la rue.Malheureusement ces petits chiens bien toilettés deviennent des cabots loin de leur hiérarchie.Les rapports (peu nombreux)que j'ai pu<br /> avoir avec ces représentants de l"ordre"m'auraient fait rire, si ces messieurs n'avaient le pouvoir quasi absolu.En effet me faire donner des leçons par des alcooliques notoires ou des repris de<br /> justesse,laisser moi rire.Bref ,vous m'aurez compris,les rouleurs de mécanique me hérissent.<br /> <br /> <br />
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B
<br /> <br /> Oh la la, mais c'est d'un conformisme tout ça ! Et puis c'est pas gentil. C'est comme si moi je faisais irruption sur votre blog pour vous dire que vos poèmes sont nuls à chier.<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> lol! Bénédicte vous deviez être un ovni dans votre profession, une rebelle aux idioties administratives! j'adore! lol<br /> J'espère que le ministère de l'intérieur va laisser les blogs tenus par des policiers libre d'expression, c'est très instructif pour les gens comme moi qui n'ont pratiquement aucuns contacts avec<br /> cette profession autres que par les faits divers à la télé. Cela humanise grandement en mettant en avant la personne dans l'uniforme.<br /> <br /> <br />
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T
<br /> Même chose en encore plus rigoureux dans les forces armées. Je trouve que dans ce registre, la police est nettement plus "débraillée".<br /> Ca ne présente pas que des désavantages. On peut mettre un luxe de mépris, de dédain, de franchise, aussi, dans un salut parfaitement réglementaire, dans une formule de politesse totalement<br /> conforme à l'usage.<br /> <br /> <br />
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A
<br /> Je suis un peu triste,avec ton départ,la Police perd un élément atypique...<br /> Lecture faite, persiste et signe avec nous,n'ayant rien à ajouter,changer ou retrancher.Fait et clos le 10/01/2011.<br /> <br /> <br />
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